Cette journée scientifique sera l'occasion de présenter des recherches en cours menées dans les écoles et les collèges de l'éducation prioritaire en France. Elle se veut le prolongement et l’élargissement du travail de réflexion entamé dans le cadre du symposium « Voir l’école depuis Marseille : pour une approche intersectionnelle des rapports de domination en éducation prioritaire », organisé dans le cadre du congrès international de l’AREF à Bordeaux en juillet 2019. Ainsi, à partir de travaux portant sur le centre-ville et les quartiers Nord de Marseille, ville caractérisée par l’ampleur de ses inégalités socio-économiques et de ses fortes logiques ségrégatives (Audren, Baby-Collin, 2017), cette journée sera l'occasion de discuter des travaux portant sur d'autres territoires de l'éducation prioritaire, élargissant, dans une perspective comparative, notre réflexion et nos interrogations.
Ces différents travaux sont menés dans la perspective théorique et méthodologique d'une approche critique de l'éducation par les sciences sociales. Les contributions à cette journée mobiliseront le modèle "géométrique" de l'intersectionnalité (Dorlin, 2008) pour conceptualiser l'imbrication des rapports de domination en contexte scolaire. En effet, depuis les travaux fondateurs des années 1960 (Bourdieu et Passeron, 1964; Bourdieu et Passeron 1970), la reproduction des inégalités de réussite scolaires a bien été établie. Toutefois, l'articulation entre les recherches en éducation et les rapports structuraux de domination est une affaire relativement récente, les études portant sur les phénomènes de discrimination de genre et de "race" font encore polémique (Travail, genre et société, 2019). Les violentes interpellations vis-à-vis des organisatrices des journées d'étude « Penser l'intersectionnalité dans les recherches en éducation », organisées à l'ESPE en 2017 (Belkacem, Chapuis et Gallot, 2017), en témoignent.
Cette journée d'études vise ainsi à visibiliser les « articulations complexes entre les différents régimes de hiérarchisation sociale » (Clair, 2012, p.109) au sein de l'éducation prioritaire, en objectivant la logique de concurrence entre les rapports sociaux (Dhume, 2019). En articulant les processus de racialisation des élèves (Poiret, 2011), non pas en termes de culture mais de statut (Lorcerie, 2003) et de sexage (Guillaumin 1992), les communications de cette journée viseront à rendre compte de l'imbrication de ces processus dans « le contexte troublé de l’éducation prioritaire » (Garric, 2019, p. 8).
Afin de faire dialoguer la recherche et les professionnel.les de l'éducation, cette journée donnera la parole à ces derniers. A cette fin, elle s'achèvera par une table ronde confrontant les travaux de la recherche aux perspectives des actrices et acteurs de terrain exposant leurs pratiques, leurs approches et les solutions qu'ils et elles mettent en œuvre au quotidien.
Les communications peuvent traiter de tout sujet relatif aux discriminations à l'école, aux élèves et à leurs familles, aux pratiques des professionnel.les de l'éducation, à la question de l'inclusion, de l'exclusion et de nouvelles formes pédagogiques, résistantes aux normes scolaires (Pereira, 2017) excluantes.
Propositions de contributions :
Les contributions sont attendues avant le 20 décembre 2019.
Elles comporteront : nom, prénom, affiliation institutionnelle, titre provisoire et un résumé de 1000 signes maximum.
Elles sont à déposer sur l’espace
https://discrim2020.sciencesconf.org/
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Références bibliographiques :
Audren, G., & Baby-Collin, V. (2017). Ségrégation socio-spatiale et ethnicisation des territoires scolaires à Marseille. Belgeo. Revue belge de géographie, (2‑3). https://doi.org/10.4000/belgeo.18726
Bourdieu, P., & Passeron, J.-C. (1964). Les héritiers : Les étudiants et la culture. Paris: les Éditions de minuit.
Bourdieu, P., & Passeron, J.-C. (1970). La reproduction : Éléments pour une théorie du système d’enseignement. Paris: les éd. de Minuit.
Clair, I. (2013). Pourquoi penser la sexualité pour penser le genre en sociologie ? Cahiers du Genre, n° 54(1), 93‑120.
Dhume, F. (2019). En finir avec la concurrence des rapports sociaux. Travail, genre et sociétés, n° 41(1), 167‑173.
Dorlin, E. (2008). Sexe, genre et sexualités. Paris: Presses universitaires de France.
Garric, J. (2019). L’exclusion ponctuelle de cours dans l’enseignement secondaire français : Les effets d’une pratique punitive banalisée. McGill Journal of Education / Revue des sciences de l’éducation de McGill, 54(2). Consulté à l’adresse https://mje.mcgill.ca/article/view/9581
Guillaumin, C. (1992). Sexe, race et pratique du pouvoir : L’idée de nature. Paris: Côté-femmes.
Lorcerie, F. (2003). L’école et le défi ethnique : Éducation et intégration. Paris Issy-les-Moulineaux: INRP ESF éd.
Pereira, I. (2017). Les paradoxes de la norme scolaire. Le Journal des psychologues, 344(2), 28-33. doi:10.3917/jdp.344.0028.
Poiret, C. (2011). Les processus d’ethnicisation et de raci(ali)sation dans la France contemporaine : Africains, Ultramarins et « Noirs ». Revue europeenne des migrations internationales, Vol. 27(1), 107‑127.